Importé de Chine par les moines bouddhistes, le thé s'impose rapidement dans la culture japonaise, du fait de l’association avec la religion. La culture de la plante a d’ailleurs été lancée au Pays du Soleil-Levant par le moine Eisai, fondateur du bouddhisme Zen, à la fin du XIIe siècle. Il n’en fallait pas davantage pour que se forge une légende tenace faisant rimer thé et sérénité. Tant et si bien, que la boisson s’est “sacralisée” au fil du temps jusqu’à devenir un véritable art traditionnel. Au Japon, le thé ne se boit pas, mais il se déguste. Et, avec cérémonie !
La cérémonie du thé, un art millimétré :
Appelée “chanoyu” qui signifie “eau chaude pour le thé”, “sadō” ou encore "chadō", termes faisant respectivement référence
aux traditions et à la doctrine, la cérémonie du thé au Japon est un art qui se pratique de façon millimétrée. Celle-ci repose
sur quatre piliers fondamentaux qui sont l’harmonie, le respect, la pureté et la tranquillité.
Les cérémonies sont extrêmement codifiées : c’est une véritable philosophie et tout le monde n’est pas autorisé à en effectuer
les préparatifs. Le maître de cérémonie doit impérativement être familier avec les pratiques et le cadre imposé. Il se doit de
connaître également les différentes variétés de thé et de maîtriser la manipulation des ustensiles servant dans le cadre de la
préparation, puis de la dégustation. Ces pratiques sont éducatives et s’apprennent dans certaines écoles au Japon. Les futurs
praticiens, appelés à devenir hôtes à leur tour, reçoivent parallèlement à leur formation, un enseignement touchant à plusieurs
domaines artistiques. Car la cérémonie de la dégustation du thé intègre également d’autres préparatifs qui imposent de savoir
précisément comment créer des arrangements floraux, comment manier certains arts, de la calligraphie à la céramique, en passant
par ceux de l’encens et même du port du kimono.
Notre expérience de dégustation du thé :
Différentes maisons de thé organisent des cérémonies de dégustation dans le pur respect des coutumes japonaises. Nous en
conservons un merveilleux souvenir.
Si nous n’avons pas été dans l’obligation de revêtir un kimono, il nous a néanmoins été recommandé de porter des vêtements
sombres, comme le veut la tradition. Nous sommes d’abord reçus dans un petit jardin de la maison de thé, aux couleurs
harmonieuses et aux agréables senteurs embaumantes qui plantent le décor. Puis, nous sommes invités à rejoindre l’entrée
d’un pavillon, où nous pénétrons après nous être déchaussés. Avant de pouvoir gagner le tatami pour nous installer autour
d’une petite table, nous devons nous laver les mains et la bouche, en guise de purification. Dans un cadre au dépaysement
total, arrive notre hôte, vêtu d’un superbe kimono. La cérémonie du thé peut alors débuter.
L’on nous sert alors un wagashi, qui est une petite pâtisserie traditionnelle, nous expliquant que la forme de cette douceur
diffère en fonction des saisons. Notre délicieuse friandise avait l’apparence d’une fleur de cerisier, symbolisant le printemps.
Notre maître de cérémonie s'affaire ensuite au nettoyage méticuleux de chacun de ses ustensiles. Le silence est d’autant plus
impressionnant que nous sommes relativement nombreux à l’observer. Toujours en communion, nous accompagnons chacun de ses gestes
d’une incroyable précision au moment d’allumer le feu qui servira à faire bouillir l’eau du thé avec délicatesse. L'atmosphère est
calme, relaxante : on se laisse bercer par le crépitement des braises, tout en respirant les effluves d’encens qui se consument et
de matcha qui infuse. Lorsque la préparation commence à frémir, le praticien s’applique méticuleusement à battre le thé vert à l’aide
d’un fouet en bambou, jusqu’à ce qu’une petite écume apparaisse à la surface. Le thé est désormais prêt à être consommé ! Il nous est
joliment servi avec raffinement dans un petit bol, dont la particularité est d’avoir une forme plus ou moins creuse selon les saisons,
afin de permettre au thé de refroidir plus ou moins rapidement. L’usage stipule que le premier bol est servi au convive que l’hôte estime
être le plus important.
Hormis les délicats arômes de notre boisson, cette cérémonie placée sous le signe du respect à la forte dimension spirituelle, nous a permis de vivre un inoubliable moment suspendu, empli de beauté.